Trois appels pour un Ciné Concert - I
A propos de la séance Méliès du 21 janvier 2017 à la Cinémathèque Française
Qui se prépare à accompagner au piano, comme c'est la tradition, un programme de films muets (et en l’occurrence le programme Méliès de samedi à la Cinémathèque Française), répond de facto à un triple appel.
L'appel formel tout d'abord. C'est celui qui autorise l'espoir, un peu fou peut-être, que pendant le temps strictement limité de la séance, les deux éléments en présence (cinéma et musique vivante) dépassent leur simple juxtaposition pour donner naissance à un nouvel « objet artistique ». Ainsi, il apparaît (parfois) pendant le temps du Ciné Concert ce que l'on pourrait nommer une « troisième œuvre », difficilement définissable, mais dont les effets sont pourtant presque physiques : qui a assisté à un Ciné Concert peut en témoigner sans l'ombre d'une hésitation.
Si le cinéma « classique », celui qui parle, fait du bruit, et que l'on connaît bien depuis les années 1930 nous a habitués à nous transporter hors du temps, hors de l'espace et finalement hors de la réalité de la salle et du fauteuil dans lequel on est assis, le Ciné Concert amène me semble-t-il, sinon une dimension supplémentaire, du moins une « situation nouvelle », (appelée plus haut « Nouvel objet artistique »). Car la distinction est de taille entre le Cinéma « Parlant », dont l'intégralité des éléments visuels et sonores sont fondus une fois pour toute, et le Cinéma Muet présenté en Ciné Concert. Dans ce dernier cas, le film est le fruit du geste créateur d'un cinéaste du passé (fruit devenu permanent par la nature mécanique de sa reproduction), et cette incarnation (parfois géniale) du passé est confrontée au « devenir incessant » des différentes interprétations musicales élaborées par les générations de musiciens, toujours plus éloignés du cinéaste, et qui se succèdent.
Toute tentative de mieux connaître la nature de « ce nouvel objet » né de la mystérieuse synthèse du passé et du présent se heurte donc à une première évidence qu'il convient de préciser avant d'aller plus loin. Comme tout objet issu d'une synthèse, le phénomène du Ciné Concert, s'il est montrable (il suffit d'assister à la séance), n'est pas dé-montrable. En effet, il suffirait de séparer ses éléments constitutifs (cinéma et musique vivante) en vue de leur analyse, pour détruire la synthèse qui le fonde, et par là-même sa réalité.
Rien n'est plus précieux cependant que d'entamer une démarche d'approfondissement de ces deux éléments pris à part : la connaissance des films muets (sans musique ajoutée) pour affiner sa perception, augmenter son plaisir visuel d'un côté, et l'étude des diverses manières musicales pour élargir l'écoute et permettre de sentir plus intensément les beautés de la musique. En cela, il ne s'agit pas de recréer artificiellement cette situation de la séance, cette synthèse du Ciné Concert à travers une phénoménologie hasardeuse, mais plutôt de se fondre plus intimement en elle le moment venu, grâce à une connaissance élargie de ses éléments constitutifs.
L'appel du passé, deuxième partie
à suivre dès demain
Film choisi pour le commenter parmi le programme de la séance du samedi 21 janvier à 14h30 à la Cinémathèque Française
Le raid Paris Monte-Carlo en Automobile de Georges Méliès
(France - 1905 - env. 9' - colorié au pochoir)
avec Léopold II (Fragson), Little Pitch, Antonich, le facteur volant et le douanier explosif
Georges Méliès Cinémathèque Française
Commentaires
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- 1. Roux Le 03/03/2017
Juste un clin d'œil pour te dire que je me réjouis de vous voir tous deux dimanche prochain !
Des bises en rafales,
Baptiste.
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